Après une journée de transport pour rejoindre Yangon via Bangkok, nous avons pris un taxi pour rejoindre notre hôtel miteux. Mr Ayé Ko, le chauffeur de taxi, nous propose ses services pour nous faire visiter Yangon le lendemain. La chaleur est étouffante, on dégouline… Nous visitons d’abord la pagode Botataung dans laquelle se trouverait un cheveu de Bouddha. Sous le stupa doré, d’étroits couloirs se succèdent, aux coins desquels des fidèles se prosternent pour prier. Partout, des boîtes transparentes laissent apparaître des monceaux de billets déposés par les visiteurs. Il paraît que les Birmans donnent en moyenne 30% de leurs maigres revenus aux temples. Et puis, il y a cette petite pièce vitrée, qui abrite le cheveu de Bouddha, devant laquelle les Birmans s’agenouillent pour méditer quelques instants, les yeux fermés, les maintes jointes, en récitant à voix basse leur prière. Le taxi nous emmène ensuite à quelques dizaines de kilomètres de Yangon, voir une pagode construite sur un îlot, au milieu de la rivière. Nous prenons un petit bateau pour atteindre la pagode. C’est agréable, sans plus. Mais la visite a le mérite de nous donner un premier aperçu de la nature birmane, exubérante.
Tout au long du trajet, nous découvrons les maisons sur pilotis, construites en bambou tressé et en feuilles de palmier, où la vie familiale s’organise dans une seule et même pièce, ouverte sur l’extérieur. Sur les motos, on monte à deux ou trois, parfois avec le dernier né de quelques mois. Les femmes, le visage recouvert de thanakha (une pâte blanchâtre obtenue à partir de l’écorce de l’arbre à thanakha, qui protège du soleil), montent en amazone, leurs longs cheveux d’ébène au vent. Partout, de petites gargotes où les gens s’attablent, au bord de la route. Nous voilà au Myanmar, et c’est le moment pour nous de tout réapprendre : une nouvelle langue, une nouvelle monnaie, d’autres habitudes de vie, un nouveau rapport au temps…
Retour à Yangon où nous allons visiter le musée des pierres précieuses, le sol birman étant un des plus riches du monde en pierre précieuses et semi-précieuses. Elles y sont presque toutes présentes.
Après une pause déjeuner, Ayé Ko nous emmène faire un tour au marché Bogyoke, un marché couvert où on trouve un peu de tout : artisanat, pierres précieuses, laques, vêtements… Mais en ce jour d’élections, si important puisque ce sont les premières élections libres depuis 1990, de nombreuses boutiques sont restées fermées. Le ciel devient sombre. Nous rentrons à l’hôtel juste avant que des pluies diluviennes s’abattent sur la ville.
Aujourd’hui, la grande pagode Shwedagon nous attend. Il fait une chaleur étouffante. Le sol brûle nos pieds nus, dès que nous ne marchons pas sur les grandes dalles blanches. L’immense stupa recouvert de feuilles d’or se dresse au milieu du temple, majestueux. Frappé par le soleil, il brille tant et plus qu’on a du mal à le regarder sans être ébloui. Tout autour, de petits temples et autres petites pagodes, tout aussi dorés, des effigies de Bouddha de toutes tailles, arborant toujours son imperceptible sourire de plénitude. Des offrandes, bananes, noix de coco, fleurs fraîches, sont déposées un peu partout. Visite éblouissante.
Nous nous faisons déposer en taxi près de la pagode Sule, puis nous errons dans les rues de Downtown. Dans les ruelles aux façades décrépites, nous nous immisçons dans la vie locale. Partout le sol est maculé de tâches rougeâtres, stigmate omniprésent des crachats de bétel. Ici, on chique beaucoup, et on crache tout autant… Les sourires abîmés, et les dents noircies par la chique en sont le criant témoin ! Nous traversons un marché local, où l’on trouve un peu de tout…Il faut toujours aussi chaud, nous sommes en nage. Nous continuons notre marche après une pause déjeuner, puis passons dans une agence de voyage pour prendre nos billets d’avion afin de relier Mandalay et Tachilek (à la frontière thaïlandaise) pour de rejoindre le Laos, cette zone étant interdite au tourisme. Le ciel devient noir, comme la veille ; nous rentrons à l’hôtel avant le déluge, pour une fin d’après-midi studieuse.
Ayé Ko vient nous chercher à 4h30 du matin, pour nous emmener à la gare routière, située à 1h00 de Yangon. Les rues s’animent déjà, les échoppes accueillent leurs premiers clients, les gens s’entassent dans les pick-up déjà bondés. Nous traversons le marché aux poissons, en circulant au pas comme pour mieux voir le va-et-vient des camelots déchargeant leurs grands paniers tressés débordants de poissons, dans la nuit éclairée aux néons. Nous prenons notre bus climatisé, enfin… à l’origine, pour un périple de 7 heures entre Yangon et Chaunghtha Beach, sur la côte ouest. Au départ, le bus était plein, puis il a continué à se remplir au fil du trajet. Dans l’allée centrale, on installe les derniers passagers sur de petits tabourets en plastique, le contrôleur circule dans le bus en grimpant pieds-nus sur les accoudoirs pour aller chercher son dû ! Nous savions que les transports étaient compliqués au Myanmar, et nous en prenons maintenant toute la mesure. La route est belle malgré tout, et la végétation incroyable.
Nous arrivons enfin à Chaunghtha en début d’après midi, où un gars de l’hôtel nous attend. Nous voyons débouler 4 scooters sur lesquels nos sacs sont chargés aux pieds des conducteurs, et chacun de nous à l’arrière. Regards étonnés et joyeux des enfants… Nous rejoignons l’hôtel cheveux au vent ! Nous découvrons nos adorables bungalows plantés au milieu des bananiers, et nous filons à pied à la plage en contrebas. Elle est immense et surtout déserte ! L’eau est vraiment chaude et nous nous éclatons dans les vagues pendant un long moment. Les enfants rient à gorge déployée, ils sont au paradis. Quel bonheur de les voir aussi heureux… David et moi marchons un peu jusqu’au stupa au bout de la plage. Ca va être vraiment chouette de se pauser quelques jours ici.
Le lendemain, nous louons des scooters pour aller découvrir une autre plage, celle de Ngwe Saung. Nous traversons les rues de Chaunghtha, puis nous nous enfonçons dans les petits villages, où nous voyons les gens vivre, simplement. Nous passons des routes à des chemins de terre, nous roulons sur les plages désertes, repassons des chemins bordés de cocotiers, de maisons en bambou. Que c’est beau ! Puis nous arrivons au premier point de traversée, car c’est ici, dans la région des deltas, que se jette l’Irrawady, en une multitude de cours d’eau. Arrivés dans petit village de pêcheurs, nous attendons le bateau qui nous fera traverser. Pendant ce temps, autour de nous, on travaille le bambou, on le coupe, on l’assouplit, en fumant un cheeroot.
Le bateau arrive, et il faut charger toutes les motos, une dizaine, en roulant sur une étroite passerelle en bois. Les motos disposées dans le sens de la descente, les passagers se calent là où ils peuvent. Puis nous traversons le premier cours d’eau, au milieu des regards, des sourires, de la vie birmane. Arrivés de l’autre côté, nous roulons sur de superbes plages totalement désertes. Seuls les crabes rouges traversent dangereusement devant nous… Parfois il faut quitter la plage et contourner par de petits chemins sablonneux, à l’ombre de la végétation tropicale. Nous sommes émerveillés. Après avoir passé deux autres cours d’eau sur de petits bateaux en bois ne pouvant accueillir que 5 motos, et appris aux enfants à conduire sur la plage (vous imaginez la banane ;-)), nous arrivons à Ngwe Saung. La plage est vraiment splendide, même si le village a vu poussé bien trop de resorts, ce qui sera sûrement la grande problématique de toute la côte birmane dans les années à venir… Nous sirotons une eau de noix de coco, avant de se jeter à l’eau et de s’éclater dans les rouleaux.
Mais il faut déjà repartir, les bateaux ne traversent que jusqu’à 17h30. Nous faisons le chemin inverse, la mer s’est encore retirée davantage, et par endroit, la mangrove laisse apparaître ses racines tentaculaires. Au retour, la marée basse nous permet de traverser toute la plage de Chaunghtha, très populaire. Les birmans jouent au ballon, se baladent à cheval ou à zèbre (si, si, ils ont domestiqué des zèbres qui semblent être croisés avec des chevaux, c’est très beaux, on a pas de photos, c’est dommage…). Nous longeons les maisons qui ont les pieds au sec à cette heure-ci, en se délectant de ses moments merveilleux. Nous rentrons à l’hôtel heureux de cette excellente journée, la peau rougie par le soleil et des souvenirs plein la tête.
Les deux jours suivants, nous restons dans les environs de l’hôtel, calmes et peu fréquentés, pour simplement profiter de la plage et de cette tranquillité, sans wifi, sans électricité en journée, nous sommes en pleine digital detox… ! Nous faisons connaissance de Géraldine et Victoire, deux jeunes françaises, qui viennent de terminer leurs études et font un voyage de 3 mois avant de se mettre en quête de travail. Quelle jolie rencontre ! Nous échangeons quelques infos sur le Myanmar et l’Indonésie, avant que nos chemins prennent des directions différentes : Bagan pour nous, la Nouvelle–Zélande pour elles. Bon voyage, les filles, profitez à fond et prenez soin de vous. Vous nous raconterez, hein ?
Puis nous quittons Chaughtha à 4h30 du matin, pour 2 heures de taxi, et 7 heures de mini bus… Nous arrivons à Pyay, ville étape jusqu’à Bagan, fourbus, tout ankylosés. Nous retrouvons le wifi, et très vite Maé nous apprend qu’il s’est passé quelque chose de très grave à Paris ce vendredi 13 novembre 2015. Nous découvrons l’horreur peu à peu, au rythme d’un wifi capricieux et sporadique. Les infos nous parviennent au compte-goutte, en désordre, et il nous faudra plusieurs jours pour prendre toute la mesure de ces évènements atroces. Nous pensons à toutes ces innocentes victimes et à leur famille, à vous tous, à la France toute entière qui coule dans nos veines, en espérant que la meilleure réponse reste le bonheur, la liberté, la vie… Tout ces récits de voyage paraissent bien dérisoires maintenant, mais je me dis qu’ils vont permettront peut-être de vous évader un peu… Et rien que pour ça, ça vaut le coup de continuer !
Nous voilà repartis pour Bagan, la vallée aux 2OOO temples. Le trajet est encore compliqué dans un bus soit disant de nuit. En fait ce bus de nuit-là, il arrive la nuit, à 2h30 du matin… Remarque, oui, vu comme ça, ça marche aussi, « bus de nuit ». Pendant le trajet, nous avons droit à une bonne série B de type Hélène et les garçons, façon birmane. Ca occupe… Réveillés en sursaut au milieu de nulle part, il faut finir la nuit dans le lobby de l’hôtel, jusqu’à 6 heures du matin… Plus aurait relevé de l’exploit yogi !
Comme les chambres ne sont prêtes qu’à 14 heures, nous louons deux mobs électriques et nous partons arpenter les routes et les chemins de Bagan, en se perdant dans le labyrinthe des temples anciens. Pendant 4 jours, nous nous régalons de ces ballades, du lever de soleil, lorsque des dizaines de montgolfières s’élèvent doucement au-dessus des temples et viennent moucheter le ciel, au coucher de soleil sur le fleuve Irrawadi, lorsque les temples prennent leur couleur orangé. 4 jours à découvrir les pagodes avec l’instinct pour seule boussole, à se laisser surprendre par d’immenses Bouddha gracieux, à admirer les fresques délavées par le temps ou reproduites par passion.
4 jours pour découvrir le travail minutieux de la laque, pour arpenter le marché et en prendre plein les sens, pour aller à la rencontre des rouleuses de cheeroots, avec toujours le sourire en partage. Ici, la douceur plane comme un voile qui enrobe toute chose, et ça fait du bien ! Prenez-en encore un peu…
Merci Julie je suis fan de tes commentaires et justement je me disais que ça faisait longtemps.
Vous avez vecu en direct des grands moments de l’histoire, l’éléction de o san su chi …. enfin ! Comme quoi la démocratie finit toujours par l’emporter …. message d’espoir en ces périodes bien sombres !
Profitez de tout et prenez soin de vous
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C’est magnifique et reposant.
Merci pour cette douceur, ce calme, c’est tellement tentant! Gros bisous à tous les 4
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c’est sur les transports en commun sont bien différents que ceux que nous connaissons chez nous
.cela reste très jolis, vous participez aux moments politiques du pays, ce pays à l’air bien pauvre aussi, au regards des photos la Birmanie semble moins luxuriante que l’Inde.
merci pour ce dépaysement que vous nous envoyez, une bouffée d’air pur, cela nous change de ce qui se passe chez nous
gros bisous à vous 4
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Que ça fait du bien!!! Photos, textes, ambiance sans oublier bien sûr de vous savoir si heureux, tout concoure à booster notre moral. Merci pour ce partage qui nous fait voyager et nous aide à relativiser: il y a tant de belles choses à voir et tant de belles personnes à découvrir, tout est une question de perspectives et celles que vous nous offrez nous font frissonner de bonheur…hummmm que c’est bon! Profitez-en les chéris, la vie est belle, vous êtes beaux, ces expériences uniques ne feront que renforcer votre tribu et votre capacité à accueillir différence et diversité. On vous aime, on vous kiffe et bien que vous nous manquiez terriblement on ne peut que saluer votre courage. Encore merci pour ces belles parenthèses que vous nous offrez et qui sont à votre image: simples et authentiques…
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Bonjour à vous 4,
Je suis Danielle une des 3 femmes(la plus vieille des 3) que vous avez rencontré à Bundi.Votre blog est magnifique et je suis ravie de voir que votre voyage continue dans de bonnes conditions.Vous allez avoir de si beaux souvenirs. Je vais continuer à vous suivre et voyager à travers vos récits.Merci pour ce partage et bon chemin
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Bonsoir les loulous
Je découvre votre blog grâce à Vincent Beau boulot et top montage de votre film
Au début je me suis dit : Mais ce sont des malades de partir comme ça ! Et depuis le 13/11 je suis terriblement jaloux de votre topissime décision : vos enfants vous diront merci du bonheur et des rencontres que vous leur faites vivre
Comme le souligne les autres commentaires, continuez à nous faire voyager car nous avons terriblement besoin de chaleur, de paysages et d amour
Nouvel abonné, je rajoute le blog à mes favoris pour être sûr de ne pas vous louper
Bises nordistes
Mila & Stéphane
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